Peintures, produits de nettoyage des métaux et des textiles, solvants, … de nombreux opérateurs et le personnel environnant sont en contact, parfois sans le savoir, avec des polluants chimiques. Une exposition régulière, même à faible dose, peut entraîner des troubles de la santé. Quelles mesures adopter pour se protéger ?

NOS REDACTEURS : Dr Yanis CARO, Pr Thomas PETIT, Département Hygiène Sécurité Environnement (HSE) – IUT La Réunion, Université de La Réunion

Quels risques encourus par les opérateurs ?

Certaines peintures, ainsi que les produits issus de l’industrie pétrolière, contiennent des polluants chimiques, dont des molécules classées « CMR » (cancérogène, mutagène et reprotoxique) à l’instar  du benzène et du formaldéhyde. Les composés organiques volatils (COVs) constituent également des polluants chimiques dont les effets toxiques s’exercent par voie aérienne. Une exposition aiguë entraine des effets transitoires (maux de tête, fatigue, nausées, etc.). Une exposition chronique affecte le système respiratoire et nerveux. L’exposition prolongée au benzène ou au formaldéhyde par inhalation peut provoquer certains cancers (nasopharynx ou leucémie myéloïde). Il est interdit d’affecter ou de maintenir les femmes enceintes à des postes de travail les exposant aux solvants classés toxiques pour la reproduction, au benzène, à certains dérivés des hydrocarbures aromatiques.

Selon le type de peintures, de solvant pétrolier ou d’additifs utilisés pour la préparation des mélanges, d’autres substances chimiques cancérogènes avérées ou suspectées peuvent être présentes : dioxyde de titane (TiO2), composés du cobalt, diisocyanate de toluylène (TDI), diisocyanato diphénylméthane (MDI), méthylisobutylcétone (MIBK), éthylbenzène, 2-butanone oxime, etc. 

Quelles mesures de protection adopter contre les polluants chimiques ?

Il est nécessaire de respecter des bonnes pratiques pour se protéger, à savoir : 
Porter des protections adaptées (vêtements de protection, gants et lunettes de sécurité, masques de protection respiratoire appropriés) ;
Respecter des mesures d’hygiène (changement des vêtements de travail souillés, vestiaires séparés pour les vêtements de travail et de ville) ;
Limiter les quantités de produits entreposées sur le poste de travail aux quantités nécessaires au travail d’une journée ;
Limiter les émanations dues à l’évaporation (refermer les contenants…) ; 

Effectuer en système clos toute opération qui s’y prête ;
Renouveler l’air intérieur du local de production ;
Ne pas mélanger les produits chimiques : ils peuvent entraîner des émanations dangereuses ; 

Conserver les déchets dans des récipients spécialement prévus à cet effet ;
Gérer les produits chimiques usagés (recyclage ou prise en charge dans un centre de déchet) ;
Mettre en place des dispositifs de lutte anti-incendie et des mesures de secours.
Dans tous les procédés ou dans les situations de travail exposant le salarié à des polluants chimiques, les mesures de prévention à mettre en place reposent sur les principes généraux de prévention et sur la démarche de prévention des risques chimiques. Après évaluation des risques, les produits chimiques classés et étiquetés dangereux doivent être si possible supprimés ou substitués par des produits ou des procédés présentant moins de risques (par exemple : nettoyage d’outils avec du propylène glycol utilisé en substitution de l’acétone, privilégier les peintures acryliques par opposition aux peintures « solvantées », etc.).
Lorsque ni la suppression, ni la substitution des polluants chimiques dangereux ne sont réalisables, des mesures particulières de protection doivent être prévues pour protéger les opérateurs et le personnel environnant :
Mise en œuvre de système clos et encoffrement ;
Mécanisation ou automatisation des procédés (lavage des cuves sans ouverture…) ;
Confinement maximal des produits ou procédés pour éviter tout contact entre les opérateurs et les produits concernés ; 

Captage des polluants à la source ;
Limitation du temps de travail aux postes exposés ;
Ventilation et assainissement de l’air du local.
Ces mesures s’appliquent lors de la manipulation, du fractionnement et du transvasement des peintures et autres polluants chimiques, de leur stockage, de leur transport ou au cours de la gestion des déchets inhérents à ces produits.
Ces mesures doivent avoir pour objectifs de :

Réduire les quantités de polluants chimiques dangereux présentes dans l’entreprise ; 

Réduire le nombre d’opérateurs exposés ;
Réduire la fréquence et la durée d’exposition des opérateurs à ces polluants chimiques.

La ventilation et l’assainissement de l’air pour lutter contre les pollutions spécifiques

Les règles générales d’aération et d’assainissement des locaux de travail sont fixées par le Code du travail. Ces textes prévoient des règles très précises pour les locaux dits « à pollution spécifique », dans lesquels sont émis des polluants sous forme de gaz, de vapeurs, de poussières ou d’aérosols liquides. La mise en place de dispositifs de captage des polluants à la source, c’est-à-dire au plus près de leurs points d’émission permet d’éviter que ceux-ci ne soient mis en suspension dans l’air et inhalés par les opérateurs. Le captage à la source est une mesure qui consiste à canaliser le flux de polluants émis vers une installation de ventilation et d’élimination, évitant ainsi sa diffusion dans l’atmosphère du local de travail. Cette aspiration doit se faire au plus près du point d’émission, ceci afin d’optimiser l’efficacité du système et de réduire les débits nécessaires. Elle doit se faire en utilisant les mouvements naturels des polluants, avec des vitesses d’air suffisantes et bien réparties, sans courant d’air parasite et avec une entrée d’air de compensation. L’air pollué doit être rejeté, après filtration éventuelle, en dehors des zones où s’effectue le captage de l’air neuf, afin d’éviter de réintroduire une partie de la pollution dans le local (source : Prévenir les risques liés aux solvants – INRS ; Fiche d’aide au repérage FAR 12 et FAR 22 – INRS).